dimanche 20 mai 2007

Un film sans cinéma mais qui fait du bien au cinéma

Annoncé comme "le film japonais barré" de la "sélection la plus arty du Festival", Dai Nipponjin de Hitosi Matumoto allait-il rééditer l'exploit du merveilleux Taste of Tea de Katsuhito Ishii, qui recouvrait à peu près le même créneau, il y a trois ans?

Le début de la projection ne laisse pas augurer grand-chose de bon. Pour l'élan poétique et l'imagination débridée, The Taste of Tea reste sans rival. On a vite peur que cette histoire de super-héros (mais pas si super que ça et pas si héros non plus) suivie au quotidien par une équipe de télé sente le sketch laborieux. Certes, comme Kitano, Matumoto vient du comique télé régressif, mais aurait-il réussi sa mue vers le cinéma? Les premières minutes encore plus laborieuses et moins drôles qu'un sketch des Robins des Bois font craindre le pire. Et puis.....

.... Quand on comprend que nous tenons là un film sorti de l'imagination de quelqu'un qui ne doit pas mettre souvent les pieds dans une salle de cinéma, mais a été biberonné à San-ku-kai et a dû s'avaler des heures de télé-réalité, de mangas et de jeux vidéos, on commence à être intéressé. Et si toute cette culture (à qui certains mettent encore des guillemets) regardée d'un mauvais oeil par son frère ainé "cinéma" pouvait tout de même apporter à ce cinéma plus que centenaire, ce cinéma mille fois enterré par Godard et Skorecki, une nouvelle innocence ? Les séquences deviennent de plus en plus inventives, vraiment drôles mais sans surmoi, sans calcul, sans chercher à se rendre plus intéressantes qu'elles ne sont. Et l'on finit par se prendre à ce jeu narcissique inventé par un Clark Kent vélléitaire. Dai Nipponjin n'est sans doute pas le premier film à traiter du "quart d'heure de célébrité" bientôt inscrit dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, mais il est sans doute le premier à le traiter sur le mode strictement warholien en mettant le registre de ses images au diapason de son propos: strictement contemporain, sans perspective en avant ni en arrière, sans épaisseur mais pas sans pertinence.
PS: Pour l'instant, l'autre film de la Quinzaine, c'est La Question Humaine de Nicolas Klotz, mais il me faut un peu plus de temps et de réflexion pour rédiger quelque chose. Quant à la Sélection Officielle, pas encore de film vraiment très aimé, en attendant, croisons les doigts, le grand Gus demain. Pas vu Zodiac et le film roumain dont la rumeur est plus que flatteuse. Les films d'Honoré et des Coen sont très agréables, mais assez attendus de la part de leurs auteurs. Quant au Bannissement, c'est vraiment l'un des films les plus emphatiques vus depuis longtemps alors que le Retour, le précédent film de Zviaguintsev était tellement abouti.

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