samedi 28 mars 2020

Flâneries à Saint-Germain

 A la sortie du lycée Montaigne (Paris, 75006), un jeune homme retrouve son ex-compagne, enseignante...


Tandis que l'un de ses collègues quitte l'établissement et traverse le jardin du Luxembourg.

Il ne prête guère attention à  sa collègue, assise avec son ami sur un banc, et dont le dialogue n'est pas des plus joyeux.

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Lui retrouve un vieux copain à Saint-Germain des Prés.

Ils esquivent le Drugstore et empruntent une petite rue ...

Ce qui leur évite de croiser le jeune homme, sur le trottoir d'en face... 

Lequel jeune homme noue un contact oculaire intéressant...


Avant de rejoindre cette inconnue ...


Sur le trottoir d'en face, à l'exact vis-à-vis, les deux hommes prennent moins de précautions, et heurtent sans ménagement la table d'une autre terrasse....

Ce qui provoque l'énervement de la femme attablée... 

Mais de cette rencontre brutale, naît là aussi un échange de regards, qui a toutes les allures d'un coup de foudre...



Noir et blanc : La maman et la putain (Jean Eustache 1973)
Couleurs : Vivre Ensemble (Anna Karina 1973)

Puisque flâner - et, qui sait, faire des rencontres sentimentales - sont désormais des plaisirs interdits, retrouver ce plaisir ordinaire au cinéma apparaît maintenant extraordinaire. 

Les débuts similaires du très connu La Maman et la putain, et du longtemps oublié Vivre Ensemble, se doublent d'une incroyable proximité géographique. Une proximité (micro-)locale qui se double d'une simultanéité temporelle. Puisque les deux films ont été présentés au festival de Cannes 1973 (Eustache en compétition, Karina à la Semaine de la Critique) et ont sans doute été tournés à la même saison, ce qui renforce l'hypothèse (fantasmée) d'un frôlement des deux équipes. 
Dernière proximité, et non des moindres, un voisinage thématique, puisque les deux films sont des âpres documents post-68, conscients de témoigner de la certaine fin d'une époque.

Quand tant de périmètres, à la fois réels et symboliques, se confondent, il est aisé d'imaginer un troisième film (ou roman photo) qui serait le croisement des deux. Histoire de rajouter une couche d'aléatoire dans ces rencontres de hasard (plus ou  moins provoquées) dues au plaisir de la flânerie. Et l'on se prend à rêver. Que se serait-il passé si Anna Karina avait emprunté le passage  piéton pour aller alpaguer Jean-Pierre Léaud ? Ou inversement, évidemment. 

Sauf erreur de ma part, Léaud et Karina ne se sont croisés que trop rarement (deux caméos de Léaud dans Alphaville et Pierrot le fou, où Léaud était assistant réalisateur, et L'île au trésor de Raoul Ruiz en 1985 (mais n'ayant jamais vu le film, je ne sais pas s'ils partagent des scènes). On a tout loisir de fantasmer sur leur rencontre au sommet. A un choix de trottoir, un choix de café près, donc ! Et l'on peut donner un titre à ce troisième film qui n'existe que dans nos têtes. Peut-être tout simplement : Vivre, putain ! 
(Ce qu'il nous reste à faire).

1 commentaire:

Ismaël Deslices a dit…

Concernant Léaud et Karina vous oubliez Made In USA de Godard