Faire venir à la rescousse le discours pour se persuader qu'on apprécie le dernier opus de cinéastes qu'on a tellement aimés, c'est l'impression à la fois désagréable ("spontanément, ça ne me touche pas") et stimulante ("si je gamberge, c'est que le coup n'est pas si raté") ressentie tant devant Copie Conforme (Abbas Kiarostami) et Rebecca H - Return to the dogs (Lodge Kerrigan).
Somme toute, voilà deux films qui, après Lynch, explorent l'application de constructions géométriques à l'art narratif : le ruban de Möbius sentimental pour Kiarostami et la mise en abyme inland-empirienne pour Kerrigan. Corollaire immédiat de tels projets, l'écrin offert à leurs actrices principales, entre portrait en majesté et mise à l'épreuve devant l'oeil mi gourmand mi inquisiteur du cinéaste. On pourrait louer la grande malléabilité de tels dispositifs, finalement moins rigides qu'ils n'en ont l'air : une certaine et inattendue légèreté musicale affleure chez Kiarostami quand la noirceur de Kerrigan vire parfois au magnétisme. De telles dispositions lancent d'indéniables mécaniques de cinéma qui, comme qui dirait, posent de passionnantes questions de représentation et d'incarnation, mais c'est peut-être un peu cela qui me gêne : le discours indécollable de la surface des images (le Kerrigan se paye même le luxe d'inclure, au bout de 20 minutes, sa propre conférence de presse pour narrer le processus de son film maudit - une évocation de Grace Slick la chanteuse de Jefferson Airplane - en train de se fabriquer sous nos yeux).
Et puis, somme toute, tous ces motifs de la reproduction, tous ces débats sur la valeur de la copie et de l'original, toutes ces interactions entre une égérie et un démiurge, je les trouve déjà dans cette petite vidéo :
Me fascine surtout le moment où se superposent l'image et son modéle, pour laisser poindre derrière le masque, une beauté d'un troisième type, encore plus indécidable : nature ou culture ?
Cela dit, cette fugitive beauté, on la retrouve tout au bout du film de Kerrigan, quand lui-même procède au remake interrogatif (un peu sur le mode du H-Story de Suwa) de cette séquence :
Somme toute, voilà deux films qui, après Lynch, explorent l'application de constructions géométriques à l'art narratif : le ruban de Möbius sentimental pour Kiarostami et la mise en abyme inland-empirienne pour Kerrigan. Corollaire immédiat de tels projets, l'écrin offert à leurs actrices principales, entre portrait en majesté et mise à l'épreuve devant l'oeil mi gourmand mi inquisiteur du cinéaste. On pourrait louer la grande malléabilité de tels dispositifs, finalement moins rigides qu'ils n'en ont l'air : une certaine et inattendue légèreté musicale affleure chez Kiarostami quand la noirceur de Kerrigan vire parfois au magnétisme. De telles dispositions lancent d'indéniables mécaniques de cinéma qui, comme qui dirait, posent de passionnantes questions de représentation et d'incarnation, mais c'est peut-être un peu cela qui me gêne : le discours indécollable de la surface des images (le Kerrigan se paye même le luxe d'inclure, au bout de 20 minutes, sa propre conférence de presse pour narrer le processus de son film maudit - une évocation de Grace Slick la chanteuse de Jefferson Airplane - en train de se fabriquer sous nos yeux).
Et puis, somme toute, tous ces motifs de la reproduction, tous ces débats sur la valeur de la copie et de l'original, toutes ces interactions entre une égérie et un démiurge, je les trouve déjà dans cette petite vidéo :
Me fascine surtout le moment où se superposent l'image et son modéle, pour laisser poindre derrière le masque, une beauté d'un troisième type, encore plus indécidable : nature ou culture ?
Cela dit, cette fugitive beauté, on la retrouve tout au bout du film de Kerrigan, quand lui-même procède au remake interrogatif (un peu sur le mode du H-Story de Suwa) de cette séquence :
... et touche enfin à une douceur nouvelle, via cet humble play-back d'images et de sons, bel hommage à la puissance des images de Pennebaker.
Récurrence des copies et dédoubements : les images de la montée des marches de l'oubliable Fairgame (Doug Liman) ont des accents très de-palmiens (artiste et modèle, body double) avec le duo entre Naomi Watts et Valerie Plame, l'espionne qu'elle incarne (et qui surgit à l'écran dans les dernières images du film). Tout cela pour dire que les exercices de copies et d'admiration viennent parfois se nicher là où l'on s'y attend le moins et qu'après le picturalisme serein et/ou doloriste des moines de Xavier Beauvois, la fabrique à icones n'en finit pas de turbiner.
Récurrence des copies et dédoubements : les images de la montée des marches de l'oubliable Fairgame (Doug Liman) ont des accents très de-palmiens (artiste et modèle, body double) avec le duo entre Naomi Watts et Valerie Plame, l'espionne qu'elle incarne (et qui surgit à l'écran dans les dernières images du film). Tout cela pour dire que les exercices de copies et d'admiration viennent parfois se nicher là où l'on s'y attend le moins et qu'après le picturalisme serein et/ou doloriste des moines de Xavier Beauvois, la fabrique à icones n'en finit pas de turbiner.
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