vendredi 11 mai 2007

Scandales

Cette semaine, la France a connu deux scandales. Tout le monde connaît le premier. Personne ne se soucie du deuxième. Et tel Denis Robert, je suis en mesure de révéler que ces deux scandales sont liés.
Le premier est celui du package Fouquet’s-Johnny trop bourré pour chanter à la Concorde-Falcon et yacht maltais. Le second n’a pas la même envergure, et n’offusquera personne. Ce n’est d’ailleurs même pas un scandale, mais plutôt une occasion ratée. Cette semaine est sortie une nouvelle édition DVD du Mépris (JLG 1963), et que n’y figure pas en bonus deux courts-métrages géniaux de Jacques Rozier Paparazzi , et Le parti des choses: Bardot Godard , sur les à-côtés du tournage et les approches à distance entre Godard, Bardot et l’œil des photographes de la presse de caniveau. Pour voir ces deux courts films de Rozier, il faut donc aller fouiner dans les bonus de l’édition Criterion zone 1 du chef d’œuvre (Contempt pour faire snob jusqu’au bout).
Ces deux évènements sont liés car ces deux courts films de Rozier démontent, vingt ans avant le Reporters (1981) de Depardon et avec infiniment plus de saveur et d’ironie, l’hypocrite jeu du chat et de la souris entre la star traquée et les traqueurs. Sarko comme Bardot sont « seuls » sur une île ou un bateau, « seuls » au milieu de l’océan face à l’horizon, sous le regard des hommes et des dieux, « seuls » mais pris au piège qu’ils ont, en partie, eux-mêmes organisés. Rozier démonte lui-même la supercherie (in Jacques Rozier, le funambule, Editions Cahiers du Cinéma, 2001) : « Il y avait beaucoup moins de paparazzi que prévu. Ce n’était pas la meute escomptée telle que Bardot l’avait connue à Rome. Il a donc fallu « fictionnaliser » un peu. Les paparazzi étaient d’ailleurs assez sympathiques. Je pense avoir filmé l’ambiguïté : Bardot était agacée, mais devaient bien sentir qu’ils étaient nécessaires à son statut de star ».

Depuis le début de la semaine, d’éminents spécialistes se relaient pour nous expliquer le triomphe de « Sarko marque globale ». Pas besoin d’être un spécialiste du marketing pour constater comment, depuis cinq ans, il occupe tous les esprits, comment il est parvenu à sommer quarante millions de citoyens à se positionner avec lui ou contre lui. Pas besoin d’être un spécialiste pour voir comment une « erreur de com’ » devient un incroyable « coup de com’ », qu’il est le premier politique à réussir ce que seules Garbo ou Bardot ont réussi : obséder au point de faire parler le plus de lui en disparaissant, en se mettant « en retraite » du monde.
Une autre dépêche dans les journaux d’hier nous apprend que Brian Molko, le chanteur de Placebo a posé plainte contre « Voici », non pas tant pour « violation de la vie privée » (il laisse ça aux Royal – Hollande), mais parce que le cliché le montrant avec une poussette à la main dans les allées du zoo de Vincennes sonne horriblement hétéro-beauf et selon ses termes, « nuirait à son image de marginal ». En gros, il n’arrive pas à faire scandale. Ouaaaah ! La bonne blague ! Ça se dit rock star ambiguë, sulfureuse, magnétique, déviante, androgyne, trouble, bi, gothique, queer… et ça n’a même pas lu Oscar Wilde ! Ça ne sait même pas qu’ « il y a quelque chose de bien pire que l’on dise du mal de vous, c’est que l’on ne parle pas du tout de vous » (je cite de mémoire). Alors que le petit Nicolas, lui, il le sait très bien depuis qu’il a quatre ans. Sans même avoir eu besoin de lire le poète victorien, il préfère qu’on le déteste, plutôt qu’on l’oublie. Et en plus lui, Nicolas, il sait très bien qu’aujourd’hui, le seul marginal, le seul qui provoque le scandale dès qu’il apparaît, c’est le milliardaire.

2 commentaires:

A. a dit…

architecte ou scénariste ou écrivain ? on ne savait pas très bien. D'ailleurs on ne savait pas très bien, depuis quelques temps, comment tu occupes ton temps, une fois la vaisselle finie. Du coup on a ici réponse à tout. Au "quoi ?" et au "qui ?" on répondra : BLOGGER ! Blogger-né. Pourquoi !? (tic de langage de notre president, que j'ai entendu dans la bouche d'une dizaine de personnes le lendemain du débat télévisé où il s'est fait "fumer" par sa concurrente, mais seule moi et 47% d'autres ont vu ça comme ça) Donc : "pourquoi !?" (si ce n'est pas de l'invasion des cerveaux !) Parce que je n'aime pas les blogs, je ne lis pas les blogs, je ne lis d'ailleurs pas sur internet, je chope des mots, je pioche, j'invente le sens, je ne lis que les livres car j'appartiens désormais au monde des dinosaures, MAIS le blog de Joachim, je le lis ! Soit je lis les articles en entier, sans perdre un mot, soit je n'ai pas le temps et alors je regrette, je me dis : je lirai ça plus tard (quand ce sera publié en livre !!!) Tout ça pour dire quoi ? MAIS BRAVO ! BRAVO ! BRAVO ! BRAVO !

Croclothilde a dit…

Ah, hier, dans la "Bande à Bonnaud", sur France Inter, Frédéric Mitterand, à quelques phrases d'intervalle, il est vrai, a parlé des élections présidentielles ET du fameux "Paparazzi" qu'il avait vu, à Cannes, avant la projection du "Mépris" qui l'avait totalement bouleversé...