Deuxième jour à Cannes, sixième film vu et premier grand plaisir: La visite de la fanfare de Eran Kolirin. L'histoire donc d'une fanfare de la police d'Alexandrie égarée dans une suburbia israélienne à la recherche d'un godotesque "centre culturel arabe" où ils doivent se produire.
Comme 12h08 à l'Est de Bucarest l'année dernière, le film donne dans la "fable comique, politique et humaniste". Comme son camarade roumain Corneliu Porumboiu, Korilin fait partie de la catégorie des faux modestes. Sous son air de pas y toucher, sans plans-séquences tapageurs ni kilomètres de travelling, il impose une maîtrise discrète à base de science du cadrage et timing des déplacements et du découpage.
L'impeccable et hilarant prologue dans un aéroport sous parrainage Tati appelle un autre voisinage : Elia Suleiman. Un cinéaste israélien et un cinéaste palestinien, cousins de cinéma ! C'est vraiment trop beau ! Si l'on rajoute que le générique est écrit à la fois en hébreu et en arabe et que l'on passe de l'une à l'autre langue dans les dialogues, l'on craint de se dire que "vraiment le cinéma, cette langue universelle et que si tous les gars du monde étaient abonnés à la Cinémathèque, le monde irait mieux..." mais évidemment, on ne va pas en rester aux bonnes intentions, peut-être nécessaires, certainement pas suffisantes et la suite tient plus que ses promesses. En signant l'air de rien un film choral pas pompeux (fluidité des récits simultanés et densité de tous les personnages) et en situant l'essentiel de son action durant une nuit où personne n'a envie de dormir, Korilin faît naître un comique essentiellement basé sur la fêlure et le désoeuvrement.
Comme l'ovation était générale et le réalisateur très entouré, je n'étais pas le seul à vouloir l'inviter prendre un pot à la sortie de la projo. Je lui ai juste demandé s'il connaissait Alexandrie, ville dont sont originaires deux de mes grands-parents, mon père ainsi que les musiciens du film et paradis perdu du melting-pot culturel méditerranéen. La réponse s'est perdue dans les applaudissements.
Pour les Parisiens, le film sera visible au Reflet Médicis (qui reprend l'intégralité de la sélection "Un certain regard"), après le Festival, donc vers la première semaine de juin. Je dis tout ça de mémoire. Il faudra vérifier. Sinon, il sort en décembre, comme tous les caramels, pour les fêtes.
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