Le promeneur parisien est parfois saisi d’un (léger) vertige, quand il croise sur les façades parisiennes des petits traits horizontaux marquant le niveau de la crue de la Seine en 1910, et qu’il imagine que des barques ont navigué dans les rues du centre de Paris. Vertige ressenti à l’échelle XXL à la vision de ces plans stupéfiants dans Still Life (Jia Zhang Ke 2007) montrant le futur niveau des eaux à 156,3 mètres, sur les façades de la ville bientôt engloutie.
Car les vrais héros des deux derniers films sont les paysages contemporains : vallée bientôt enfouie, chantiers de démolition de Still Life (2007) et parc d’attractions de The world (2005). Paysages paradoxaux, car annonciateurs d’une mutation, mais d’une mutation « à l’envers ». Il y a des chantiers prométhéens dans Still Life, mais on y démolit bien plus qu’on y construit. Et si The world prend acte de l’émergence des non-lieux contemporains. Ce fameux parc, d’un artifice grossier et triomphant, existe coincé entre des autoroutes et des chantiers d’immeubles standardisés.
Il se dégage pourtant une certaine harmonie dans le regard porté sur ces paysages.
Plus de 350 ans séparent ces deux images (à gauche, le Pont de Six de Rembrandt), et pourtant, elles semblent voisines. Surtout dans l’échelle qu’elles donnent à la figure humaine. Dans l’image de droite, il est frappant de voir à quel point l’employé du parc semble échappé de la gravure de gauche. Plus proche d’un paysan du dix-septième siècle que d’un winner du vingt-et-unième, il ne peut pas être chose qu’un témoin incrédule d’un monde façonné sans lui.
Où donc trouver sa place, dans ce monde factice ?
Dans The world, l’espace social est en sous-sol, dans les souterrains. Les coulisses grouillants du parc ne sont même pas backstage, mais understage. Aujourd’hui, les pro-Chinois ne clament plus : « cours camarade, le vieux monde est derrière toi », mais « le nouveau monde est au-dessus de nous ». Les personnages de Jia Zhang Ke sont toujours les derniers survivants d’un monde voué à être englouti.
Mais la mutation et l’engloutissement travaillent le cinéma de Jia Zhang Ke, non seulement sur le plan thématique, mais aussi sur le versant du traitement de l’image, comme en atteste ce fondu-enchaîné.
Car les vrais héros des deux derniers films sont les paysages contemporains : vallée bientôt enfouie, chantiers de démolition de Still Life (2007) et parc d’attractions de The world (2005). Paysages paradoxaux, car annonciateurs d’une mutation, mais d’une mutation « à l’envers ». Il y a des chantiers prométhéens dans Still Life, mais on y démolit bien plus qu’on y construit. Et si The world prend acte de l’émergence des non-lieux contemporains. Ce fameux parc, d’un artifice grossier et triomphant, existe coincé entre des autoroutes et des chantiers d’immeubles standardisés.
Il se dégage pourtant une certaine harmonie dans le regard porté sur ces paysages.
Plus de 350 ans séparent ces deux images (à gauche, le Pont de Six de Rembrandt), et pourtant, elles semblent voisines. Surtout dans l’échelle qu’elles donnent à la figure humaine. Dans l’image de droite, il est frappant de voir à quel point l’employé du parc semble échappé de la gravure de gauche. Plus proche d’un paysan du dix-septième siècle que d’un winner du vingt-et-unième, il ne peut pas être chose qu’un témoin incrédule d’un monde façonné sans lui.
Où donc trouver sa place, dans ce monde factice ?
Dans The world, l’espace social est en sous-sol, dans les souterrains. Les coulisses grouillants du parc ne sont même pas backstage, mais understage. Aujourd’hui, les pro-Chinois ne clament plus : « cours camarade, le vieux monde est derrière toi », mais « le nouveau monde est au-dessus de nous ». Les personnages de Jia Zhang Ke sont toujours les derniers survivants d’un monde voué à être englouti.
Mais la mutation et l’engloutissement travaillent le cinéma de Jia Zhang Ke, non seulement sur le plan thématique, mais aussi sur le versant du traitement de l’image, comme en atteste ce fondu-enchaîné.
Travelling dans le couloir qui s’achève avec l’irruption d’un jet d’eau, qui devient lui-même une matière pixellisée d’où naît l’image digitale. Entre les deux plans, le personnage de la princesse à la robe de mariée est passée d’un être de chair à sa représentation dans un mur d’images. Morphing du plan cinématographique vers l’image télévisuelle, image sans chair et sans échelle. Comme le parc. L’engloutissement à l’œuvre dans le monde contemporain – et dont prend acte le cinéma de Jia Zhang Ke - est aussi celui qui noie le monde réel sous le tout-venant des images.
Un point de vue complémentaire sur le cinéma chinois dans cet excellent blog
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