lundi 9 juillet 2007

Quatre saisons en raccourci

Comme me le suggérait une connaissance récente, avec cet été parisien qui ne se décide pas à arriver, on a quand même la chance de vivre, à chaque nouvelle journée, les quatre saisons regroupées en une douzaine d’heures. A peine le soleil pointe-t-il le bout de son nez, à peine les terrasses se remplissent que les giboulées viennent mettre tout le monde d’accord. Pas un trajet à vélo qui n’ait droit à sa petite bruine passagère. Et puis, le passage tee-shirt, petite laine, c’est désormais plusieurs fois par jour !
Ces raccourcis des quatre saisons en ville et en seul film, c’est dans Hannah et ses sœurs (Woody Allen 1986) qu’on peut le voir. 85 % du film est tourné en intérieurs, mais quand il pointe le nez dehors, Woody devient élégiaque citadin et nous montre son Manhattan, successivement en automne, en hiver, au printemps, en été...



































... et à nouveau en automne.

Woody ne fait donc pas tout à fait comme Kim Ki Duk, (Printemps, été, automne, hiver… et printemps 2004), mais il aurait très bien pu appeler son film « Automne, hiver, printemps, été et encore automne » car dans le cycle des saisons, tout commence et tout aboutit à l’automne, la saison qui se cache derrière toutes les autres. Car quand l’été n’arrive pas, ce n’est pas à un printemps tardif que nous avons droit, mais plutôt à un automne précoce. Toujours là au pied levé, ce foutu automne ! Hiver, printemps, été, éphémères par essence ! Seul l’automne, qui peut aussi bien s’inviter en janvier qu’en juillet, cumule le plus grand nombre de jours dans l’année. Automne, saison des saisons ? En tout cas, la saison qui paraît la plus sinistre comme la plus picturale, celle qui évoque aussi bien la décrépitude que la majesté, celle où s’entremêle splendeur et déclin de la nature.
Cet entrelacs, c’est exactement celui avec lequel doivent faire les protagonistes de ce film où Woody parvient à l’un des sommets de sa filmo en faisant son Tchekhov. Eprouver, comme Hannah, ses sœurs, son mari (Michael Caine) et Woody, les intermittences de l’affection, du dévouement et de l’estime de soi, ça procure les mêmes impressions qu’un paysage d’automne. Ce n’est jamais resplendissant, jamais éclatant. Ça fout même un peu le cafard. C’est faire face à un mélange d’espoirs fanés et de sérénité. C’est enfin prendre conscience que beaucoup de projets, de sentiments et d’espérances ont dépéri, mais c’est aussi se raccrocher aux quelques-uns qui s’affirment dans leur plus belle et leur plus noble sérénité.

Comme le dit un chapitre du film, ce qu’il y a de plus beau dans l’automne, c’est l’autumn chill : aussi bien le frisson que la fraîcheur de cette saison, quelque chose qui nous fait trembler mais nous électrise, plus sûrement que cette chaleur attendue ces jours-ci et qui risque fort de davantage nous assommer que nous faire vibrer.

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