Bon, je ne l'ai pas visitée, cette fameuse exposition Vides à Beaubourg, cette fameuse exposition avec... rien dedans, si ce n'est des cimaises blanches, des courts textes et la signalétique du musée qui n'en prend que plus de valeur. Rappelons le principe de l'expo: neuf salles vides, certes, en mémoire de neuf souvenirs d'expositions fantômes, de neuf histoires conceptuelles, de neuf "degrés zéros de l'art" où le vide était invoqué pour divers motifs. Si j'en crois certains avis, la difficulté était pourtant de ressentir la singularité de chacune de ces absences. Quand Yves Klein vide une galerie, c'est parce que quantité d'évènements s'y déroulent aux alentours, avant, après. Si le musée est vide, c'est que l'art est dans la rue. Ainsi, un vide ne s'apprécie qu'en raison du plein qui lui est voisin. Juxtaposer des salles vides, sans effet de contraste, c'est vraiment prendre le risque de l'exposition symptôme de l'institution qui n'a plus rien à dire.
Mais bon, ne l'ayant pas visitée, cette expo, mon avis sur celle-ci devrait être aussi mutique qu'une page blanche.
Je ne l'ai pas visitée, donc, mais au moins a-t-elle permis cette petite vidéo baladeuse et facétieuse :
Preuve qu'il y avait aussi qu'il y avait sans doute là, dans la déambulation homogène et ininterrompue, même plus rythmée par les nécessaires arrêts devant les oeuvres, l'occasion d'une expérience zen à bon compte, dans l'espace pur, englobant, quasi lacté du musée.
Le plus drôle avec cette expo, c'est que je me demande si elle ne serait pas un hommage involontaire :
- d'une part à cette déambulation un poil plus angoissante :
Dressed to kill - Pulsions (Brian de Palma 1980)
- d'autre part et surtout au travail d'un autre artiste : Laurent Pariente travaillant (dans l'échelle, les motifs constructifs, la répétition) à l'exact intervalle entre sculpture conceptuelle et architecture modulaire. Parois minimales et ressérrées, recherche de l'étroitesse qui labyrinthise l'espace, tout le travail de Pariente cherche à donner le maximum de densité à un espace, au départ, sans aucune qualité (parois blanches, répétitives).
Pour donner une idée, cette petite vidéo sur le montage d'une intervention au musée Bourdelle...
(voir la vidéo là, si le lecteur exportable reste blanc...)
... où précisément le fait qu'il intervienne au milieu des sculptures (littérallement prises entre les murs et ne pouvant être vues que de manière fragmentaire) vient à la fois perturber et enrichir son système. En somme, lui aussi expose du vide mais pour donner une nouvelle densité à l'espace muséal, quand les vides de Beaubourg paraissaient au contraire dégonfler l'intensité que propre aux salles d'exposition.
4 commentaires:
Dommage que l'on oublie que stimuler les organes des sens... et la vision en particulier a aussi un effet cognitif...
Oui, effectivement, Laurence... Je me demande si cette exposition de "vides" ne serait pas le pendant visuel de ce fameux restaurant où l'on est servi dans le noir complet, pour mieux stimuler le goût et l'odorat.
Juste évoquer le magnifique souvenir de l'oeuvre de Laurent Pariente au Musée Bourdelle.
Plus que convaincant et d'une sensibilité incroyable, il fallait jouir de la matérialité de la lumière rendue comme une nuée.
Il faudrait aussi dans le genre pièce vide parler de l'artiste allemand Schneider nous offrant soi des successions de pièces vides (Maison Rouge) plus angoissantes les une que les autres soit des reconstructions de son appartement toutes aussi pertubantes.
Ah merci David. Pour ma part, je n'avais pas visité l'installation de Pariente au musée Bourdelle mais avait parcouru plusieurs de ses autres "labyrinthes" en galerie. Je ne connaissais pas cet artiste allemand, et les quelques photos me paraissent prometteuses. Pour continuer dans l'étalage de références, comme ça, sur les photos, j'y trouve même un certain air de parenté avec l'installation "en forme de cage" de Claude Lévêque à l'actuelle Biennale de Venise (que je crois tu n'as pas beaucoup appréciée et que je ne pense pas avoir la chance de visiter non plus).
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